Le safeword est un signal d'urgence du BDSM qui, utilisé par la soumise, indique à son partenaire qu'il doit, immédiatement et sans discussion interrompre l'acte en
cours, et la délivrer de ses liens ou de toutes autres contraintes éventuelles aussi rapidement et prudemment que possible.
Le safeword est toujours à considérer comme appelant une réaction de la plus haute urgence, quelle que soit la situation et aussi anodine qu'elle puisse paraître aux yeux de celui qui contrôle
les événements.
Les partenaires conviennent en général d'un « mot magique » qui sera reconnu en tant que code de sécurité ou encore une codification par couleurs inspirée des feux rouges. Le "mot
magique" doit être judicieusement choisi : non usuel, en dehors du vocabulaire courant, donc sans ambigüité possible pour ne pas être prononcé par hasard mais également pas trop complexe pour ne
pas que la soumise l'oublie ou se trompe au moment où elle en a besoin.
Lorsqu'on porte un baillon, le meilleur choix semble être le « code du trousseau de clés » : le dominant qui bâillonne sa soumise lui glisse un trousseau de clé dans la main ou
n'importe quel objet susceptible de faire du bruit en tombant sur le sol. En cas de détresse (ou par réaction inhérente à un éventuel engourdissement des membres ou une perte de conscience),
celle-ci n'a qu'à lâcher l'objet, et le son de sa chute est synonyme de safeword pour appeler à la libération immédiate.
Une soumise ne prononce pas son safeword sans raison. Les accidents physiques sont possibles, mais également des chocs sur le plan émotionnel qui, pour paraître parfois tout à fait
incompréhensibles aux yeux du partenaire, n'en sont pas moins réels. La personne qui se voit forcée d'interrompre le jeu pour une cause d'ordre psychologique – peur, panique, phobie, etc. – sera
doublement déçue, honteuse, peut-être, de « n'avoir pas été à la hauteur », ou prise d'un sentiment de ridicule injustifié… le moment n'est alors pas aux reproches, mais à la
consolation et au partage : une âme blessée se soigne avec autant d'attention – sinon plus – qu'un corps meurtri.
Dignité, honneur, orgueil et sens du devoir ne sont pas apanages du seul Maître, dans le BDSM : contrairement à ce que l'image commune pourrait laisser
croire, la fierté est immense dans la soumission.
La personne qui se fait dominer tend à catalyser et rechercher cette fierté au miroir sans tain des yeux de son partenaire : elle veut s'y voir, elle souhaite qu'il la voit… aussi
mettra-t-elle, trop fréquemment et parfois à l'excès, un point d'honneur à ne pas utiliser un safeword susceptible de lui laisser à l'esprit l'âcre sentiment de n'avoir pas été à la
hauteur.
Paradoxalement, plus celle qui se soumet éprouve d'amour et de complicité pour celui qui la domine, plus elle s'efforcera à générer ce sentiment mutuel de fierté, repoussant déraisonnablement ses
limites pour ne pas avoir à crier le mot redouté, que sur l'instant elle juge synonyme d'indigne… mais quel cadeau est-ce là, qui consiste à se mettre inutilement en danger, à exposer
l'être aimé au risque de provoquer un accident qui lui sera imputé, à placer la relation elle-même sous une terrible épée de Damoclès ?
Celui qui domine a un véritable devoir de l'après. Partager des plaisirs d'adultes ne peut se résumer à jouir, puis fermer les yeux sur les conséquences de la jouissance : il est
impératif de s'enquérir du bien-être de celle qui s'est soumise, dans les heures, les jours qui succèdent à ce moment intense passé à deux. Attendre des réponses n'est pas suffisant ; il
s'impose de poser les questions, aussi directes et indélicates puissent-elles paraître.
Que ces réponses n'arrivent pas, que la réalité se voit déguisée par la partenaire, et le dominant réitérera des activités destructrices dont il ne soupçonne pas les répercussions.
La soumise, trop à même de dissimuler des symptômes qu'elle seule connaît, détient un terrible pouvoir sur son compagnon de jeu : elle peut pousser celui-ci vers la destruction à petit feu
de celle qu'il aime, pour la satisfaction d'un dangereux instinct masochiste personnel qui ne trouvera jamais sa cure dans le BDSM.
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